L’hippodrome de Sully
entre VENTS et GUERRES
Créé en 1905 par la Société civile des courses de Bayeux, l’hippodrome de Sully oscille entre succès et coups durs avant de fermer définitivement ses portes en 1982. Retour sur l’histoire de ce lieu, qui fit les beaux jours du monde hippique au 20e siècle et dont les archives viennent d’être versées aux Archives du Calvados.
Premières pierres
À l’origine de l’hippodrome de Sully, des actionnaires motivés par l’envie de créer un champ de courses près de Bayeux. Leur objectif : améliorer la race chevaline sur le territoire.
Le terrain est trouvé sur une propriété de la famille d’Harcourt à Sully et la Société civile des courses de Bayeux est constituée le 9 décembre 1905 avec un capital de 40 000 francs. L’ensemble des actionnaires se réunit autour du maire de Bayeux qui en devient le premier président. Une cellule de douze administrateurs s’investit particulièrement, parmi lesquels le député François, baron Gérard.
Moins de 8 mois plus tard, le 22 juillet 1906, le nouvel hippodrome est inauguré. La proximité de la gare et du petit train « Le Décauville », qui relie alors Bayeux à la côte, facilite la venue d’un public enthousiaste et nombreux.
Survivre à la Première Guerre…
Alors qu’elle n’est créée que depuis huit années, la société doit faire face à la Première Guerre mondiale, ce qui stoppe net son développement. Après l’assemblée générale du 31 octobre 1914, il faut en effet attendre le 7 juin 1919 pour voir se réunir à nouveau les actionnaires. Henry-
Pierre Delmas, décédé en 1916, est remplacé par le comte de Foy qui assure désormais la présidence. Les deux réunions de courses de chevaux annuelles peuvent enfin reprendre et l’hippodrome de Sully accueille de nouveau le public.
Fort de son succès, le champ de courses se dote, au gré des années, de tribunes confortables, d’un paddock, d’écuries, d’une maison de garde et d’une piste de qualité, limitée par des bornes-devises en granit.
« La saison des courses normandes à Bayeux », article issu de La Revue illustrée du Calvados, août 1909, AD14, 14T/23/1/3
… puis à la Deuxième
En 1939, alors que la Société civile des courses de Bayeux connaît son apogée, la Seconde Guerre mondiale éclate. Les troupes allemandes s’installent sur une partie du champ de courses et la société
consent un bail à la Ville de Bayeux pour la conversion de onze hectares du centre de l’hippodrome en cultures
potagères municipales. Le restant est exploité comme herbage à dépouiller et à faucher.
Dès les lendemains du Débarquement, les troupes britanniques prennent la partie sud-ouest longeant la route de Bayeux à Port-en-Bessin. Les tribunes sont utilisées par les soldats de juin à août 1944. Bientôt, une unité de chars d’assaut campe dans l’est du champ de courses et établit un cantonnement, un état-major et des ateliers de réparation. Les parties nord, ouest et sud sont ensuite utilisées pour la circulation des tanks. Ce trafic incessant pendant tout l’hiver 1944-1945 vient à bout du sol qui se retrouve profondément déformé.
Changement de statut
En 1946, la famille d’Harcourt attribue un nouveau bail à la Société hippique de Bayeux pour relancer les courses. Les réunions à l’hippodrome de Sully sont alors de véritables succès, avec un public de plus en plus nombreux. Mais les affaires florissantes sont mises à mal par la loi du 24 juillet 1966 qui met fin à la forme juridique de société par actions. Le 11 septembre 1973, l’Association des courses de Bayeux est constituée sous le statut de la loi de 1901. Elle ne permet plus à ses contributeurs de dégager des bénéfices. Philippe de Bourgoing, sénateur, conseiller général du Calvados, maire de Tracy-sur-Mer et ancien président de la Société hippique de Bayeux; en est élu président.
Les courses de Bayeux… à Vire
Le 12 janvier 1978, une tempête détruit en grande partie les tribunes. L’événement met un coup d’arrêt brutal aux courses à Sully. Le coût de la réparation, estimé à 50 000 francs, est trop important au vu des deux utilisations annuelles de l’hippodrome. À titre d’abord provisoire, c’est à l’hippodrome de Vire qu’ont lieu les courses. Malgré de nombreuses tentatives par Philippe de Bourgoing, en lien avec la famille d’Harcourt, pour faire revenir les courses à Bayeux, la fusion est définitivement actée en 1982 avec la société des courses de Vire. L’hippodrome de Sully tire définitivement sa révérence.
Philippe de Bourgoing aurait eu 100 ans cette année
Après des études parisiennes, Philippe de Bourgoing (25 juillet 1921-19 février 2007) reprend l’exploitation agricole familiale de Tracy-sur-Mer. C’est dans cette commune qu’il débute à 26 ans son parcours politique. Elu conseiller municipal en 1947, il est maire de 1950 à sa mort. Conseiller général depuis 1964, il occupe la place de premier vice-président de 1976 à 2001 où il devient le bras droit indéfectible de Michel d’Ornano puis d’Anne d’Ornano. Comme président de la commission des travaux publics de 1979 à 2001, il est réputé pour connaître la moindre route, le moindre chemin vicinal. Il œuvre au développement du réseau routier et des Bus Verts.
En parallèle de ces mandats locaux, il devient sénateur en 1970 suite au décès de Jean-Marie Louvel. Il occupe cette fonction jusqu’en 1998. En octobre 1974, il est même élu président du groupe de l’Union des Républicains et des Indépendants (UREI) du Sénat. Membre de la Confédération des indépendants dès sa création en juin 1975, il est membre fondateur du Parti républicain, créé en 1977.
Philippe de Bourgoing a également reçu de nombreuses distinctions honorifiques : Chevalier du Mérite agricole dès 1959, Chevalier Commandeur du Knight british empire en 1996, Chevalier de la Légion d’honneur en 1999 et Officier dans l’Ordre national du Mérite en 2005.
LIRE AUSSI
Les voyageurs de commerce
SUR LA ROUTE des voyageurs de commerce Du saltinbanque au représentant de commerce en passant par les nomades et les forains, les marchands ambulants ont longtemps contribué à l’histoire du commerce dans notre région. Qui sont-ils et comment ont-ils exercé leur...