Marie-Laure Levillain et Pascal Lebaron
Calvadosiens solidaires

Que peuvent avoir en commun Marie-Laure Levillain, infirmière et Pascal Lebaron, chef cuisinier ? L’esprit de solidarité. Alors que l’épidémie de coronavirus atteignait son plus haut niveau dans notre pays, ces deux Calvadosiens sont allés prêter main forte aux personnels d’EHPAD, l’une dans le Bas-Rhin et l’autre dans notre département.

Pascal Lebaron

Il faut prendre soin de nos ainés »

Chef de cuisine au collège Charles Lemaître des Monts d’Aunay, Pascal Lebaron est allé renforcer au pied levé l’équipe de cuisine de l’EHPAD de Cesny-Bois-Halbout, touchée par des arrêts maladie.

 Parlez-nous de votre métier… 
Je suis chef cuisinier au collège Charles Lemaître aux Monts d’Aunay. Je prépare le déjeuner des collégiens.

Comment vous est venue l’idée de rejoindre l’EHPAD des Monts d’Aunay ? 
C’est mon responsable qui m’a appelé en renfort pendant le confinement pour me demander si je pouvais aller rejoindre l’équipe de cuisine de l’EHPAD pendant trois jours, car il manquait plusieurs employés. Je faisais partie des cuisiniers habitant le plus près de l’établissement. J’ai accepté spontanément car je trouvais cela normal vu le contexte et puis ce n’est pas contraignant pour moi d’être solidaire et de rendre service. Si je n’étais pas venu, le chef n’aurait pas pu prendre de repos pendant 15 jours et j’ai déjà travaillé pour les personnes âgées au cours de ma carrière, je connais leurs besoins.

 Etiez-vous inquiet ? 
J’ai éprouvé un peu d’angoisse car il y avait une suspicion de Covid 19 dans l’ehpad mais il ne faut pas oublier les ainés. Il faut prendre soin d’eux. Les résidents de cet ehpad pourraient être mes parents, ma maman a 82 ans.

 Comment avez-vous été accueilli ? 
Très bien. Tout le monde a été très gentil et reconnaissant que je sois venu. Je m’adapte facilement. J’ai 30 ans de carrière, ça aide. Le chef de cuisine m’appelait pour savoir si tout se passait bien. Quand je suis parti, les gens m’ont applaudi et m’ont remercié. Cela m’a fait chaud au cœur et surtout je me suis senti utile.

 Quel était votre travail ? 
Je préparais les repas des 80 personnes âgées de l’établissement. C’est différent de mon travail habituel car dans un EHPAD, il faut préparer 3 repas par jour contre un seul au collège et la nourriture est beaucoup mixée. On travaillait avec un masque, c’était la règle d’or bien-sûr, mais ce n’était pas très facile, surtout avec les lunettes devant le four !

 Que vous a apporté cette expérience ? 
J’ai rencontré une équipe solidaire et compétente. C’est un souvenir de plus dans ma carrière. Je suis venu aider, pour moi c’était normal.

Marie-Laure Levillain

Prendre soin des autres, c’est important pour moi »

Infirmière gestionnaire des cas MAIA au CLIC de Pont-l’Evêque, Marie-Laure Levillain est allée, durant 18 jours, aider les équipes d’un EHPAD de Strasbourg.

 Parlez-nous de votre métier… 
Je suis infirmière. J’ai travaillé 33 ans en milieu hospitalier, 3 ans en ehpad et depuis 2013, je suis infirmère/gestionnaire des cas MAIA (méthode d’action pour l’intégration des services d’aide et de soins dans le champ de l’autonomie) dans le Centre Local d’Information et de Coordination de Pont-l’Evêque. Être infirmière a toujours été une vocation. Prendre soin des autres, c’est important pour moi. Il n’y a pas de plus belle chose que l’être humain et la vie.

Comment vous est venue l’idée de rejoindre cet EHPAD de Strasbourg ? 
En tant qu’infirmière, j’ai toujours été inscrite sur la liste de la réserve nationale. Dans la région Grand-Est, des soignants étaient malades, il y avait un manque d’effectifs et de nombreux patients atteints par le coronavirus… Quel que soit son métier de base, on ne peut pas rester insensible à ce que vivait mes collègues dans cette région. Lorsque le Président du Département du Bas-Rhin a lancé un appel à candidature pour aller soutenir les personnels d’EHPAD de son département, je ne me suis pas posé la question, c’était une évidence pour moi d’aller les aider. J’en ai parlé avec ma famille, mes collègues et ma hiérarchie. Il s’est passé à peine trois semaines entre ma prise de décision et mon arrivée à Strasbourg.

 Etiez-vous inquiète ? 
Je n’avais pas peur. Je m’étais assurée que tout le matériel nécessaire était disponible sur place, je n’avais donc aucune inquiétude en partant là-bas.

 Comment avez-vous été accueillie ? 
J’ai été très bien accueillie et surtout très attendue. Un grand panneau où était inscrit « Bienvenue » m’attendait avec plein de petits messages des petits-enfants des résidents de l’EHPAD pour nous dire merci. Nous donnons aux gens mais ils nous donnent beaucoup aussi. Des personnes, des entreprises, venaient régulièrement à l’EHPAD pour nous donner des masques, du gel, des tabliers, des gants… Nous avons même eu des repas d’offerts. En voyant arriver ces dons, on poussait un ouf de soulagement et on se disait : quelle belle chaine de solidarité ! On a vécu la bienveillance, la créativité, et le réconfort des gens. Il y a eu beaucoup d’entraide entre tout le monde et jusqu’au bout. L’équipe était bienveillante et il y a eu un travail d’équipe formidable.

 Quel était votre travail ? 
Comme mes collègues, je pratiquais beaucoup de soins et une surveillance renforcée des résidents, nous étions en vigilance accrue en permanence. Nous tournions dans les services afin que ce ne soit pas trop dur mentalement. Il a fallu gérer les urgences, le stress des patients et aussi l’administratif, prendre soin des personnes atteintes de pertes cognitives qui ressentent les choses même si elles ne s’expriment pas. Il y avait un étage entier dédié à l’accueil des personnes atteintes du Covid 19. Quand une personne allait mieux et ressortait de cette unité, nous étions super contents et nous les applaudissions. J’en suis encore ému aujourd’hui… On se sent utile quand on aide les gens à s’en sortir et il est vrai qu’à un moment, on se demandait si ça allait s’arrêter…

 Que vous a apporté cette expérience ? 
Cela a été une expérience forte, intense et généreuse qui restera imprimée en moi. J’ai été confronté aux décès de résidents mais ce qui a été difficile, c’est surtout que les familles ne soient pas là au moment du décès de leurs proches.
J’ai aussi découvert l’Alsace que je ne connaissais pas et je compte bien y retourner. J’ai lié des relations amicales sur place et nous avons prévu nous revoir après cette crise. Le principal dans cette expérience, c’est que l’on ait pu donner à certains soignants la possibilité d’aller aider d’autres départements, car la solidarité a été aussi entre les départements. Je suis restée 18 jours à Strasbourg. Il a fallu que je reprenne mon travail afin de soulager mes collègues qui m’avaient remplacé. S’il y avait une deuxième vague, je serais prête à repartir.

Share This