Le cheval, la plus noble
conquête du Calvados

Le Calvados entretient avec le cheval une histoire ancienne et privilégiée. Depuis le Haut Moyen Âge, il fait partie intégrante de sa culture et draine une activité économique importante. Son histoire dépend étroitement des activités humaines et des besoins de chaque époque qui a vu émerger ou disparaître des types de chevaux spécifiques en fonction des usages.

Une civilisation hippomobile

À partir du XVIe et jusqu’au XVIIIe siècle, les populations urbaines, de plus en plus nombreuses, ont des besoins croissants en nourriture, matières premières et sources d’énergie. Inversement, les villes produisent des marchandises qu’elles doivent expédier vers l’extérieur. Le cheval est l’artisan de ces nouveaux échanges entre villes et campagnes par le biais de l’attelage et de la voiture. Cette civilisation hippomobile dure jusqu’au développement des chemins de fer et le paroxysme de la présence équine en ville est atteint au début du XIXe siècle. Le cheval a participé à la construction d’un paysage urbain caractéristique.

Carton de publicité représentant un Normand en blaude dégustant des tripes à la mode de Caen, seconde moitié du XXe siècle.

Archives du Calvados, 10FI/145, un convoi hippomobile allemand longe la côte normande, s.d. [1944], tirage sur papier, 23 x 16 cm

Archives du Calvados, 14T23/1/A/31, la faucheuse de Wood Pilter en vente à la quincaillerie Duclos à Lisieux, 1907, annonce publicitaire extraite de la Revue lexovienne illustrée, 10 x 9,5 cm

Dans la guerre

Lors de la bataille de Hastings, en 1066, la cavalerie normande fait la différence face aux armées anglaises exclusivement composées de fantassins. La tapisserie de Bayeux fait figurer plus de deux cents chevaux et la stature de Guillaume le Conquérant est incontestablement liée à la puissance de sa cavalerie. Symbole des batailles mythiques du Moyen Âge, le cheval est aussi un outil essentiel de conflits plus contemporains et considérablement plus meurtriers. Les équidés font l’objet d’un recensement par les mairies en vue de réquisitions en cas de conflit armé. Les dépôts de remonte sont créés pour assurer un approvisionnement suffisant en temps de guerre. Le premier s’installe à titre expérimental à Caen en 1818 dans le quartier de la Visitation. Treize ans plus tard, le corps de remonte est étendu au niveau national mais celui de Caen est le plus grand de France. Son ressort s’étend sur le Calvados, l’Eure et la Seine-Maritime, et comprend deux succursales : Falaise et le Bec-Hellouin. Durant la Première Guerre mondiale, la plupart des chevaux sont utilisés pour tracter l’artillerie et seulement dix pour cent sont employés par la cavalerie. Les chevaux assurent également le ravitaillement des troupes, le transport des soldats…

Bon à savoir

Le livre, La plus noble conquête de l’homme est en vente au prix de 2 euros. Pour le commander : https://www.archives.calvados.fr

Les travaux de la ferme et de l’industrie

Dans les domaines agricoles et industriels, le cheval de trait est un acteur bien présent jusque dans les années 1960. Il appartient au domaine des animaux de travail par opposition aux animaux de rente qui produisent de la viande, du lait ou des œufs. Pour les travaux des champs, le cheptel est composé de bêtes de trait lourd et de sujets plus légers pour tirer à bonne allure la carriole. L’évolution du machinisme agricole nécessite par la suite le perfectionnement des races pour insuffler davantage de force. L’Augeron est ainsi développé au début du XXe siècle à partir du Percheron. Au sein de l’entreprise, le cheval apparaît aussi bien comme un acteur vivant que comme partie intégrante du patrimoine matériel avec tous ses équipements : écuries, harnais, attelage… Dans le Calvados, il n’est pas utilisé dans les mines de charbon car les galeries sont trop basses. En revanche, les chevaux de trait sont utilisés pour les manèges, pour faire tourner les treuils et rouler les berlines.

Archives du Calvados, 18FI171/106, foire Saint-Gilles de Condé-sur-Noireau, vers 1900, carte postale, 9 x 14 cm.
Archives du Calvados, 2FI343, hippodrome de la Prairie à Caen, le 7 août 1900, tirage sur papier 5,5 x 8,5 cm
Carton de publicité représentant un Normand en blaude dégustant des tripes à la mode de Caen, seconde moitié du XXe siècle.

La vogue des courses

La mode des courses de galop est venue d’Angleterre dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et gagne l’aristocratie française. Interrompues à la Révolution, les courses de galop reprennent sous l’Empire et se développent sous les régimes suivants. Dans le Calvados, les premières courses hippiques se déroulent à la Prairie de Caen les 26 et 27 août 1837 sous l’impulsion de la Société Royale d’Agriculture et de Commerce. Son but est alors de relever l’industrie chevaline qui constitue l’une des plus importantes sources de prospérité de la région. En août 1864, l’hippodrome de Deauville est inauguré par le duc de Morny. L’installation fonde alors l’identité de la toute nouvelle cité balnéaire. Celle-ci organise en parallèle, à partir de 1887, la vente de poulains de l’année. Dans son sillage, les champs de courses se multiplient dans le département : Pont-l’Évêque en 1875, Vire en 1880, Courseulles-sur-Mer en 1882, Livarot en 1888 ou encore Lisieux en 1889. Cet engouement draine des sommes financières considérables. Les ventes de yearlings, ne cessent d’atteindre de nouveaux records : alors qu’un futur crack pouvait être adjugé autour de cinquante mille francs dans les années 1900, les sommes dépassent aujourd’hui le million d’euros.

Cet article a été réalisé avec l’aide des Archives départementales du Calvados.